RÉ'Elles, notre série sur les femmes entrepreneures

5e portrait de notre série RÉ’Elles, qui illustre ce mois-ci la flamme d’entreprendre dans un milieu encore très masculin. 

De son parcours pour rendre l’automobile plus verte à celui de la flamme olympique, découvrez l’aventure entrepreneuriale d’Iphigénie Ngounou, fondatrice de Rétrogaz et lauréate 2023 de Réseau Entreprendre® Seine-et-Marne 

Bravo à cette femme inspirante qui va porter la flamme olympique dans quelques semaines. Mesdames, enflammez-vous pour vos idées et ne lâchez rien ! Nous serons toujours là, chez Réseau Entreprendre®, pour vous accompagner. 

La flamme de l’entrepreneuriat 

Le 6 juillet à Évreux, le monde olympique aura les yeux rivés sur elle : Iphigénie Ngounou, fondatrice de Rétrogaz, a été sélectionnée parmi 11 000 Français pour relayer la flamme olympique des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Choisie en raison de son engagement pour «rendre la société plus solidaire, plus inclusive, plus juste et plus durable » elle a accueilli cette marque de reconnaissance « avec beaucoup d’humilité », célébrant le travail accompli et ressenti, en même temps, une grande pression sur ses épaules. « De l’impatience, de l’intimidation, de l’émotion, le 6 juillet, ce sera un moment inouï pour moi. Jamais dans ma vie, je n’aurai pu imaginer vivre cela ! », confie cette maman de trois enfants qui « sont super fiers », ajoute-t-elle. Forcément… 

Iphigénie Ngounou, 55 ans, a un parcours de 30 ans dans l’industrie automobile. De formation universitaire en économie et gestion, elle est « tombée dans l’automobile par hasard », dit-elle, le jour où elle répond à une offre d’emploi chez un sous-traitant automobile. Elle partira ensuite chez Renault comme directrice des relations fournisseurs, avant de rejoindre sept ans plus tard, le groupe PSA. Début 2020, le monde entier s’apprête à basculer, sa vie aussi. « Ma carrière était bien installée mais j’ai commencé à m’inquiéter du sort de la planète et de l’avenir de l’humanité. Le déclic est arrivé le jour où mes enfants m’ont demandé quelle planète nous allions leur laisser, conscients que je fabriquais un gros objet qui pollue et qui consomme : l’automobile. À l’heure du réparable et du recyclable, je me suis dit : pourquoi le véhicule serait-il le seul objet que l’on jetterait à la casse ? Pourquoi ne pas essayer de le réparer ? Ayant moi-même un véhicule diesel, j’ai voulu faire d’un enjeu personnel un projet d’intérêt général ». L’idée de Rétrogaz était née.  

Quelques semaines avant le premier confinement, Iphigénie démissionne du groupe PSA, la tête à son nouveau projet, elle bouillonne : Qu’est-ce qu’on reproche au fond à l’automobile ? Comment verdir un véhicule sachant que c’est l’usage qu’on en fait qui pollue et pas le produit lui-même ? Comment résoudre les dégâts qu’on a occasionnés plutôt que de créer un nouveau produit ? « J’ai épluché une directive européenne sur la loi Climat et Résilience qui définit les seuils d’un véhicule thermique polluant à ne pas dépasser en termes de pollution et de niveau de consommation. J’en ai fait un référentiel, un objectif à atteindre », poursuit-elle. L’idée prend forme : celle de ramener un vieux véhicule aux normes définies par cette directive européenne. « À ce moment précis, j’ai pensé : c’est ça, la vraie écologie ! ».

Le projet nécessite de mobiliser les parties prenantes, la première d’entre elles étant l’État. Iphigénie contacte le ministère des Transports qui la renvoie vers le ministère de l’Écologie. « À la suite du constat qu’un particulier ne pouvait en réalité s’adresser à l’État directement, j’ai décidé de créer l’entreprise », explique-t-elle. Le terrain ne lui est pas totalement inconnu puisque trois ans avant de quitter PSA, le lancement de la marque de mobilité du groupe Free2move lui avait été confié. « Ayant obtenu le statut d’intra-entrepreneuse, j’ai vécu dans des pouponnières de start-ups ou j’ai pu gérer le projet de A à Z. Je suis devenue entrepreneuse mais avec les moyens d’un grand groupe ». Un beau tremplin qui lui a permis de goûter à l’entrepreneuriat et notamment à la volumétrie de travail que cela requiert, à la pluralité de cerveaux que cela demande. Son départ dans le cadre d’un plan de départ volontaire lui ouvre les droits au chômage et c’est sur ses deniers propres qu’elle commence à travailler sur la solution imaginée pour convertir les véhicules diesel en véhicules hybrides. Elle se rapproche d’un ancien collègue ingénieur à la retraite afin de mettre au point rapidement la solution. Leur travail va durer deux ans et demi et aboutir en 2023 à l’approbation de la technologie, testée sur son propre SUV, par lAdeme* et le ministère de la Transition écologique. 

En 2023, quand la phase de commercialisation est lancée, ses réserves financières sont insuffisantes pour l’accompagner d’un plan de communication digne de ce nom. Iphigénie se tourne vers divers organismes dans l’espoir d’obtenir un financement. « Réseau Entreprendre® a accepté de nous soutenir et cette aide financière nous a permis de faire levier pour obtenir par la suite des prêts bancaires et lever d’autres fonds » assure-t-elle. Elle devient alors lauréate et bénéficie d’un accompagnement financier et humain pendant 2 ans, « une formidable occasion de partager des bonnes pratiques et d’apprendre le métier de dirigeant et d’entrepreneur ».

*Ademe : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie.
  

Quatre ans après sa création, Rétrogaz tourne à plein régime. La commercialisation a été lancée en janvier 2024 et déjà près d’un millier de véhicules ont été convertis. L’entreprise sera implantée dans 8 régions d’ici la fin de l’année. Une croissance fulgurante boostée par un coup de pouce médiatique inattendu. « Nous sommes nés médiatiquement le 11 décembre 2023. Ce jour-là, à la suite d’un article paru dans le Parisien quelques jours plus tôt, quatre chaînes ont diffusé un reportage sur l’entreprise. Cette formidable visibilité a lancé la marque ».  

Iphigénie est fière du travail accompli et heureuse de pouvoir aider ses concitoyens. « Les personnes qui viennent pour convertir leur vieux diesel en un véhicule hybride GPL nous parlent de leur vie et nous expliquent l’impact de ce petit changement dans leur quotidien. Nous aidons le pouvoir d’achat en proposant aux ménages de conserver leur voiture et nous accompagnons le monde dans une transition douce en opposition totale avec la rupture représentée par le fait de mettre son véhicule à la casse.Je suis fière d’avoir accompli quelque chose d’utile et porteur de sens pour les gens et pour la planète. J’espère pouvoir transmettre cette entreprise à mes enfants, pas seulement en termes de patrimoine mais aussi en valeurs pour leur faire passer ce message : aidons-nous les uns les autres ! ».  

Cette technologie, qu’Iphigénie revendique avec fierté, part du principe qu’un véhicule devenant hybride au gaz émet 20% de CO2 et 60% de particules fines en moins et présente un gain de consommation de 15 à 25%. « Nous venons juste rajouter quelques pièces neuves au véhicule d’origine et notamment un 2e réservoir à l’arrière. À l’avant, nous créons un système parallèle avec un 2e jeu de calculateur et d’injecteur qui permet de calibrer le véhicule pour que le moteur au gasoil fonctionne également au GPL. Le véhicule devient hybride avec deux carburants : 60% de gaz et 40% de gasoil », explique-t-elle. L’opération prend trois jours et coûte 4 000€ en moyenne avec homologation et changement de la carte grise. Simple ? Encore fallait-il y penser !  



  

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