Les 2 premières missions de la Banque de France sont la stratégie monétaire et la stabilité financière. La stratégie monétaire, c’est faire en sorte que l’économie soit bien financée et la stabilité financière, c’est faire en sorte que les banques et les assurances soient solides, résilientes, résistantes pour le bien collectif.

Dans le cadre de la stratégie monétaire, les banques centrales sont amenées à prêter des liquidités aux banques, et prennent en garantie des crédits aux entreprises jugées saines, d’où la cotation financière des entreprises de plus de 750 000 € de chiffre d’affaires. Cela concerne 300 000 entreprises en France, dont 20 000 en Bretagne. Si la cotation est favorable, les banquiers pourront mettre en garantie ces crédits pour se financer auprès de la Banque centrale. L’Eurosystème regroupe 20 pays européens ; c’est au niveau européen qu’est décidée la politique monétaire, dont les taux, par le Conseil des Gouverneurs. En fonction des pays, le refinancement des banques se fait soit par des créances privées, soit par des titres publics, soit par un mix des deux.

Jean-Hugues BOURDON, responsable régional visibilité et services à l’économie et la société et Hervé MATTEI, directeur régional Bretagne de la Banque de France

Dans sa mission de stabilité financière la Banque de France met en place une réglementation à destination des banques (Bâle 3, Bâle 4) qui consiste à évaluer les réserves dont disposent les banques. Elle demande aux banques d’avoir plus ou moins de fonds propres pour faire face à des défauts de remboursement de crédits. La qualité du portefeuille de crédits d’une banque est évaluée par la cotation Banque de France et/ou par un système de notation interne, qui répond aux exigences de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (APCR).

Le refinancement auprès de la Banque de France coûte aux banques et se répercute sur le taux d’intérêt pratiqué par la banque à son client.

La cotation financière des entreprises est établie à dire d’experts. Elle est calculée une fois par an. Elle tient compte d’éléments financiers issus des bilans des entreprises et d’éléments qualitatifs collectés par l’analyste de la Banque de France lors de questionnaires ou d’un entretien avec le chef d’entreprise. Il s’agit toujours d’une proposition d’un analyste, validée par un autre analyste.

La Banque de France a été précurseur sur les sujets de la transition climatique. Elle a été à l’origine de la création du NGFS (Network for Greening the Financial System), le réseau des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier, lancé en 2017 et qui regroupe aujourd’hui 130 banques centrales. Dans ce cadre, plusieurs travaux ont été menés, dont des stress tests afin d’évaluer l’impact du changement climatique (inondations, augmentation des températures, etc.) sur les banques et les assurances et de proposer des mesures de précaution pour faire en sorte que le système financier soit capable de résister. L’autre enjeu est celui d’orienter les financements vers les projets qui prennent en compte le changement climatique, d’où l’Indicateur Climat.

Une entreprise peut être solide financièrement, mais si elle n’est pas sur la trajectoire de décarbonation, elle finira par ne plus être compétitive, ne plus avoir de clients et ne plus rembourser ses crédits. Ce sera un risque pour les acteurs financiers.

En 2023, l’Etat français a établi un texte législatif qui a renforcé le rôle de la Banque de France sur cette démarche. La Banque de France a formé ses analystes sur la méthode, en lien avec les scénarii de l’ADEME et de Météo France.

En 2024, la Banque de France va solliciter les entreprises du transport, des foncières (sociétés de HLM) et des producteurs d’énergie, qui sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre, afin de calculer leur Indicateur Climat.

Dès 2025, les banques auront accès à la cotation financière et à l’Indicateur Climat des entreprises, qui sera attribué tous les 2-3 ans, la stratégie de décarbonation étant posée sur du moyen terme.

Applicable depuis le 1er janvier 2024, la directive européenne Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) fixe de nouvelles normes et obligations de reporting extra-financier. Elle concerne les grandes entreprises et les PME cotées en bourse. Elle vise à harmoniser le reporting extra-financier des entreprises européennes. Celui-ci porte sur les indicateurs Environnementaux, Sociaux et Gouvernance de l’entreprise (ESG).

La Banque de France collecte ces informations, qui sont disponibles pour les banques, afin d’éviter de multiples démarches auprès des entreprises, et pour les entreprises concernées.

Toutes les entreprises doivent réfléchir à leur trajectoire de décarbonation.

Cependant, le calcul de l’Indicateur Climat tiendra compte de la taille de l’entreprise et du secteur d’activité de celle-ci. Plus une entreprise présentera des enjeux de décarbonation importants, plus l’Indicateur Climat sera complet.

Pour les petites entreprises, par exemple des entreprises de service, qui présentent moins d’enjeux de décarbonation, la transition sera moins lourde que des entreprises industrielles qui consomment beaucoup d’énergie.

Il intègre 3 éléments :

  • Le scénario de décarbonation de l’ADEME : quelles sont les mesures prises par l’entreprise pour décarboner son modèle (bilan carbone, investissements prévus) ? Par rapport à son secteur d’activité, est-elle sur une trajectoire plus favorable ou en retard ?
  • Le sous indicateur physique, c’est-à-dire la localisation géographique, qui est plus ou moins à risque par rapport aux événements climatiques (inondations, tempêtes, etc.)
  • La maturité : quelle place dans la gouvernance la stratégie de décarbonation occupe-t-elle ? Dispose-t-elle d’une force de travail RSE pour ce faire ?

La Banque de France estime à 20 000 entreprises en France le nombre d’entreprises qui seront évaluées sur le scénario de décarbonation et 300 000 sur les éléments physiques et gouvernance.

Article rédigé par Véronique L’AOT, directrice Réseau Entreprendre® Bretagne